Biographie

72 dpi p&b rgb DSC_2741

 

 

Retrospective: Ana Regina Nogueira
par Pierre Devin 

L’« Hymne à la joie » m’accueille chez elle. Ayant connu une grave crise dans la vie, elle en fait son manifeste. Elle a mis son savoir faire au service de communautés paysannes. Et pourtant, Ana Regina est issue d’un milieu aisé, cultivé.

L’art mais aussi la photographie fait partie des préoccupations. Née en 1948 à Belo Horizonte (Minas Gerais), elle mène une vie d’adolescente curieuse du monde et d’une pratique artistique. Elle passe une année aux USA où elle réalise ses premiers instantanés. La culture livresque ne lui suffit plus et elle suit des cours d’art. Elle s’intéresse à l’œuvre du photographe Gil Prates, qui deviendra son premier mari. Elle se passionne aussi pour la technologie liée à la photographie.

En 1972, elle abandonne son cursus de psychologie à l’université de Jussieu à Paris. Autodidacte comme la majorité des photographes de sa génération, elle devient photographe professionnelle. Elle continue à assumer elle-même le travail de traitement en laboratoire. En 1973, Ana Regina Nogueira munie d’un Nikormat voyage au Mexique et aux USA. Cela lui permet d’élaborer son premier portfolio.

Dans cet après 1968, elle aborde les grands thèmes: justice, amour, préjugé, beauté… Travaillant aussi pour Vogue, elle mène une vie cosmopolite entre Belo Horizonte, Rio, Paris, Londres, New York, Milan. Elle visite aussi des lieux inaccessibles du Nordeste du Brésil. Les grands sujets qu’elle traite alors et qu’elle qualifie de socio-anthropologiques sont la religion, les médecines populaires, les homosexuels, l’oligarchie brésilienne, les pêcheurs…

L’autobiographie n’est jamais absente de ses préoccupations. Cette autobiographie photographique sera le lieu d’une reconstruction personnelle après l’épreuve de la drogue, qu’elle qualifie d’enfer. « La nuit obscure de l’âme », révèle cette période de souffrances et de folie. La photographie est d’une grande force, elle surgit comme un cri. « Purification » parle de rédemption de méditation.

En 1994, elle quitte la grande ville de Rio et va vivre dans l’intérieur. Pendant cinq ans, c’est l’occasion pour elle de se reconnecter avec la nature et de mener une vie beaucoup plus altruiste. « J’ai toujours aimé photographier les gens en mouvement. J’ai déménagé souvent. J’ai demeuré dans de grandes villes mais la nature m’attirait… Revenir après trente ans à mes origines, dans l’intérieur de l’état des Mines m’a permis de me retrouver dans l’harmonie et la paix ». En 1999, la photographe revient à la photographie.

Sa nouvelle maison est aussi un outil de travail pour continuer à produire et à enseigner la photographie. En 2000, elle participe à Fotofest à Houston. Toute l’année 2002, elle réalise un ample documentaire photographique sur la région de Funil (sud-est de l’état de Minas Gerais) bouleversée par la construction du barrage hydroélectrique. C’est plus de 11.000 images qui furent produites. Elles perpétuent une vie et des paysages perdus.

L’itinéraire d’Ana Regina Nogueira est double. Elle a parcouru le monde. Cet itinéraire se double d’un itinéraire intérieur passionnant. À chaque étape la forme photographique a été travaillée en conséquence. La chambre noire, la lumière, la révélation au-delà de leur fonction prennent alors pour Ana Regina Nogueira un sens métaphysique.

(Août 2005)

Voltar para o índice Mostra Fotográfica